Bonsoir !
J'ai des dizaines d'histoires a raconter et si peu de temps pour les ecrire et des tonnes de photos a partager, mais aucune envie d'aller en ville trouver un cybercafe pour les envoyer...
Ceux qui me connaissent savent que je n'aime pas raconter ma vie. Vous etes donc gates en lisant ce blog, je ne me suis jamais autant epanche :-)
Je suis de retour en Iran apres 5-6 jours dans la (tres) petite republique autonome du Naxcivan. Un jour je vous raconterai mon entrevue en tongues avec le ministre du tourisme dans son bureau, comment une grue de 16 tonnes m'a sorti de la berge d'un lac ou j'etais enfonce jusqu'aux marchepieds, et plein d'autres petites historiettes sympathique. En tout cas des paysages magnifiques dans cette region agricole hors du temps. On se serait cru dans la Syldavie de Tintin, les Ladas des annees 80 en plus.
En tout cas, dans 10 ans ils parleront encore du Belge avec sa Land Rover. De memoire de toutes les personnes que j'ai interroge, meme le ministre, c'est la premiere fois qu'ils voyaient un Europeen en voiture chez eux.
De retour en Iran, je me dois de vous toucher un mot de l'hospitalite des Iraniens. Je n'ai jamais rencontre ca ni en Asie, ni en Amerique du Sud, ni dans le Moyen-Orient arabe, meme pas en Jordanie ou en Oman, c'est vous dire.
Il ne se passe pas un jour sans que je sois invite pour boire le the, pour petit dejeuner, pour dejeuner, pour diner ou pour loger. Si je m'installe trop pres d'un village, je suis sur de devoir plier bagages pour aller loger chez un villageois. C'est extraordinaire !
Je me suis malheureusement decide a refuser de plus en plus d'invitations au risque d'en vexer certains. Il y a plusieurs raisons a cela Apres toute une journee sur la route, j'ai parfois (souvent) envie de calme. Aussi, la vie au ras du sol n'est pas ma tasse de the (et dieu sait si j'en bois pour le moment) et rester assis 2 heures en tailleur sur un tapis apres toute un journee sur mon siege inconfortable n'est pas ce qu'il y a de mieux pour mes grandes guiboles. Une troisieme raison est la barriere de la langue. Je ne me suis pas trop investi dans l'apprentissage du Farsi (Les iraniens parlent farsi comme les tomates. Je sais c'est mauvais, mais j'ai promis a un ami que je la placerais) et avec mes 20 mots et leurs 20 mots d'anglais, on s'est vite tout dit et on arrive vite a se regarder en silence pendant 2 heures.
Par contre boire le the avec des bergers, manger du pain et du fromage lors d'une pause avec des paysans ou prendre un repas avec des gens qui parlent un peu mieux anglais est un vrai plaisir.
Quelques anecdotes a ce sujet :
- Le deuxieme jour alors que j'avais installe mon bivouac dans une oasis abandonnee a l'ombre d'un fort en ruines, les villageois (je n'avais pas vu le village derriere la colline) defilent pour m'inviter a rester chez eux. A la 9eme tentative, je craque et je plie bagages. Parce que le gars parle bien anglais (le seul au village) et aussi parce qu'au bord du Golfe il fait 35 degres la nuit en cette saison et un peu d'air conditionne etait bienvenu. Me voila dans la famille de Sadegh a diner avec ses freres et cousins. Une fois le repas termine, les femmes terminent les restes dans la cuisine (la vraie vie quoi :-). Un peu plus tard, nous avons une visite: la securite militaire. C'est une region reculee pas touristique du tout (ce que j'aime quoi) et jamais un europeen n'est passe par ici, donc ils sont un peu nerveux. On leur explique qui je suis, ce que je fais et que je pars demain et tout et tout et ils s'en vont satisfaits.
Le lendemain, vendredi jour du seigneur dans le monde musulman, je me dis que je suis bien la-bas et que j'en profiterais bien pour demonter mon reservoir de flotte qui fuit. Sous 40 degres, Sadegh qui jeune pendant le Ramadan m'aide. Faut deboulonner pas mal de trucs dans la benne avant de pouvoir acceder au reservoir. On s'apercoit qu'il y a une soudure qui a cede dans le fond. On met le reservoir dans la voiture de son frere et on se rend chez le soudeur du village. C'est un fabricant de charrue et de chassis de remorques agricoles et quand j'ai vu un gamin de 12 ans allumer un chalumeau, je me suis enfui en courant. J'ai besoin d'un chirurgien, pas d'un boucher pour souder de l'inox. On tentera une reparation a l'epoxy (qui n'a pas marche pour la petite histoire, mais ce n'est pas le sujet).
En fin d'apres-midi, Sadegh recoit un coup de fil de son pere. Les militaires sont venus chez lui et ont demande que je parte le plus vite possible. Mais Sadegh ne veut pas me mettre a la porte a la nuit tombante et je ne pars que le lendemain matin.
2 jours plus tard, je recois un email de sa part me disant de ne plus lui envoyer d'emails, son acces a internet ne marchant plus. Je trouve ca un peu bizarre. Il m'apprendra une semaine plus tard qu'il a ete emmene pour une journee complete d'interrogatoire. Pauvre Sadegh, victime de sa generosite. Ca n'est arrive que dans cette region du Sud. Quand je croisais une voiture de police, j'etais sur que j'allais les revoir 5 minutes plus tard pour un controle. Je presentais le petit mot que Sadegh m'avais ecrit en Farsi et apres 1/4 d'heure c'etait bon. Maintenant quand un flic m'arrete, c'est par curiosite, juste pour une petite visite de la voiture et une caresse a Marcel.
- Si vous avez lu mon dernier post en anglais, vous savez tout sur les decors de reve du lac Urumyeh. Sa plage de sel blanc comme de la neige tombee la nuit, son eau rose, ... Apres avoir passe l'apres-midi seul dans ce decor de reve, des voitures commencent a arriver et plusieurs campements se dressent (c'est mercredi soir, debut du weekend en Iran). Les barbecues s'allument et je suis presque choque de ne pas etre invite, on m'offre juste quelques patisseries :-) (ben oui, on prend des habitudes :-).
Il a fallu que je sois le sauveur du jour avec mes cables de demarrage pour que les choses se mettent en route et je suis invite a 3 barbecues. Je me rends chez les premiers qui m'ont invite, 4 hommes de Salmas, a 30 km de la et je m'installe en tailleur pour manger mes brochettes de poulet. Je ne suis plus un gros mangeur de viande au grand desespoir de mon ami Jean (ni meme un gros mangeur du tout depuis que je suis parti), mais ils ne l'entendent pas de cette oreille :-)
Heureuse surprise, il y a de l'alcool au programme. Mais la vodka de contrebande rendrait un Polonais aveugle en 2 jours et un fabricant de therebentine ne renierait pas le whisky contenu dans une cannette. Il faut l'estomac bien accroche, mais j'en ai vu d'autres :-) une fois le repas termine, je vais cherche ma shisha, histoire d'utiliser le charbon qui reste. Ca leur fait tres plaisir.
Il s'avere finalement que personne ne reste. Les tentes, c'etait juste pour se mettre en maillot et se rhabiller. Avant de partir, ils me laissent un grand bidon d'eau, des tomates et du melon. Une generosite vraiment inegalee.
Pour terminer l'histoire de la journee : j'avais prudemment attendu la fin de la journee avant d'ouvrir ma tente, refroidi par la tempete essuyee la nuit d'avant que rien ne laissait prevoir. Voyant que tant de gens viennent camper, je finis par l'ouvrir juste avant le coucher du soleil. A 22h je me retrouve tout seul comme Un con sur cette plage et le vent commence evidemment a se lever et souffler en bourrasque. Dans le sens oppose de la veille et alors qu'il n'y a pas eu un pet de vent la journee, c'est a n'y rien comprendre !
Mais bon ca ne sert a rien de s'enerver. Que puis-je faire contre le vent. Ca sera juste une autre nuit dans sommeil...
Derniere petite anecdote sur l'hospitalite : le lendemain, je me leve vers 9h. Je vais encore flotter une heure ou deux dans l'eau rose. Comme disais mon camarade FX a la mer morte, il faut pas etre tombe dans les ronces en short avant de s'y baigner. Ici c'est pareil, le sel brule toutes les petites coupures des mains et des pieds. Mais ca reste magique de flotter sans efforts dans un decor pareil (j'arrete de vous promettre les photos, mais je ferai au plus vite). Je pars vers 12h et j'enchaine la visite des intersections du 38eme parallele et des 45eme et 46eme meridiens. Le premier dans les collines qui bordent le lac, le deuxieme dans un dedales de champs, canaux et chemins agricoles. Je veux absolument aller m'installer pres d'une riviere que j'avais vu 10 jours avant, mais elle est encore a 70 kilometres et c'est tres tres juste pout y arriver avant le coucher du soleil. Mais je tente quand meme. Evidemment il fait nuit quand j'arrive a proximite. En cherchant la riviere, je me perd dans une plantation de peupliers ou je prends une demi-heure pour faire demi-tour sur un mouchoir de poche entre 2 fosses. A peine sorti de la, je vais me planter dans une sabliere, encore 30 minutes de perdues. Je trouve enfin la riviere, qui ressemble plutot a un marecage a cet endroit. Mais des grosses pompes diesel d'irrigation installees tous les 50 metres font un boucan infernal. Je tourne encore 1/2h et je vais me planquer au milieu d'un verger de pechers pour ne pas etre derange. Premiere fois que je ne trouve pas mon campement avant le coucher du soleil et je ferai en sorte que ca soit la derniere.
Evidemment, a peine la tente ouverte, des lampes de poches s'approchent. 4 gars viennent m'inviter a boire le the. Je suis creve, j'ai envie d'aller dormir, mais je ne peux pas refuser. Je me suis installe sur leurs terres sans demander la permission. En fait ils etaient installes sur le toit d'une petite cahute dans le verger a 30m de la. Mon arrivee n'avait donc pas ete si discrete que ca :-). Me voici donc de nouveau assis en tailleur a boire du the, manger de la pasteque et des graines de tournesol. On arrive a avoir un semblant de conversation. Ils connaissent la Belgique parce que la TV kurde emet depuis Bruxelles (je suis dans le Kurdistan Iranien). Mais revenons au sujet de l'hospitalite.
Le lendemain, je suis reveille par des voix. Ce sont eux qui passent m'apporter 2 grosse pasteques en allant travailler dans le verger. 1h plus tard je me leve et ils viennent me chercher pour aller prendre le petit dejeuner avec eux. Pain, fromage et the a la fraicheur d'un pecher. J'ai beau m'habituer, je reste etonne et ravi de cette hospitalite. Ils m'indiquent le chemin de la riviere (a 50m en fait). Mais l'endroit est rempli de femmes qui lavent leurs tapis. Je fais quelques kilometres pour trouver l'endroit d'ou je vous ecris. Je suis installe dans un grand paturage et ici la riviere est assez profonde pour nager. L'endroit parfait pour passer une journee de repos. J'en profite pour faire ma lessive (je ne m'embarrasse pas de scrupules ecologiques, si toute monde lave ses tapis dans la riviere, c'est pas 3 calbars, une chemise et un pantalon qui vont faire une grosse difference). Je dois juste m'interrompre 5 minutes pour aller repecher un gamin qui avait voulu nager comme moi mais qui n'avait aucune idee de la force du courant a cet endroit. La routine quoi :-) vous pourriez penser que j'en ai fini avec mes histoires d'hospitalite et de generosite, mais non ! Alors que je me promene dans le paturage pour quelques photos bucoliques de moutons noirs en conciliabule ou de buffles qui se jaugent tete contre tete sur fond de ciel bleu et nuages blancs, je suis hele par les bergers et c'est reparti pour une tournee de the, pain, fromage !
Je reviens a mon campement pour me voir offrir le seul poisson attrape sur l'apres-midi par mes voisins pecheurs ! Je n'en reviens pas.
Il ne me restait qu'a l'ouvrir et le vider, quelque chose que je n'avais jamais fait. Mais comme dit mon pote Vincent, si je sais vider un faon, un petit poisson ne devais pas me poser de probleme :-)
De toute facon, un deuxieme pecheur passant par l'a bien volontiers fait pour moi.
Simplement grille sur feu de bois avec de l'huile d'olive et de la fleur de sel cueuillie par mes soins au lac d'Urumyeh et accompagnee d'une mousseline parfumee a l'huile de truffe, c'etait un vrai regal. Premier jour que je cuisinais autre chose que des boites de thon :-)
Bon, je vous laisse. Il est minuit et il ne fait plus que 16 degres. Je monte dans mes appartements au Land Rover Inn. Demain c'est maintenance. Je dois absolument faire verifier et reparer les freins qui perdent beaucoup d'huile. Je dois aussi faire nettoyer le sel du chassis avant qu'il ne commence a l'attaquer. Je dois aussi prendre connaissance des dernieres nouvelles du Kurdistan Irakien, histoire de voir si la situation est sure avant d'attaque l'Iraq (facon de parler :-) dans 2 jours.
Je vous tient au courant !
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